Accueil > Conférences/Débats > 2017 > Les journées de la résistance > Projection de L’armée des ombres de Jean-Pierre Melville.
Projection de L’armée des ombres de Jean-Pierre Melville.
dimanche 22 octobre 2017, par
Dans le cadre des journées de la résistance, Bruz Citoyenneté et le Grand Logis vous propose de redécouvrir le chef d’oeuvre de Jean-Pierre MELVILLE en copie restaurée.
Olivier Bolher, spécialiste du cinéma de Melville, présentera le film.
Synopsis : Arrêté pour « pensées gaullistes », Philippe Gerbier, qui dirige un réseau de résistants, s’échappe lors d’un transfert vers la Gestapo parisienne. Mais les arrestations des membres de son réseau se suivent et les tentatives de libération ne sont pas toutes fructueuses.
La bande-annonce :
Projection : vendredi 1 décembre à 20H30
Lieu : le Grand Logis / Tarif tout public : 4,20 €
Réalisation : Jean-Pierre Melville
Scénario : Jean-Pierre Melville, d’après le roman de Joseph Kessel
Distribution : Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Meurisse, Jean-Pierre Cassel...
Durée : 140 minutes.
Date de première sortie : 12 septembre 1969
Date de sortie de la copie restaurée : 06 mai 2015
Article de Hervé Aubert : https://www.cineseries-mag.fr/criti...
Les héros du quotidien
L’armée de ombres est LA référence des films sur la résistance. Et pour cause ! Le roman a été écrit par Joseph Kessel (l’auteur du Lion, mais aussi des paroles françaises du Chant des Partisans) en se basant sur sa propre expérience personnelle dans la Résistance. À cela, le réalisateur Jean-Pierre Melville a ajouté ses souvenirs de résistant, qui ont marqué une part non négligeable de sa vie et de sa carrière de cinéaste. Rappelons que son premier long métrage était une adaptation d’un livre de résistant, Le Silence de la mer, de Vercors.
L’Armée des ombres, c’est à la fois un témoignage sur la Résistance, et un hommage à celle-ci. En insistant sur les sacrifices consentis par des hommes et des femmes qui ont risqué leur vie, leur sécurité, leur santé, leur famille, leur métier, au nom d’un idéal supérieur, Melville dresse le portrait de héros du quotidien, de gens modestes qui, se trouvant dans des situations extraordinaires, agissent du mieux qu’ils peuvent. Fidèle à la vision gaullienne, Melville nous montre une France qui était majoritairement résistante, depuis le noble flamboyant jusqu’au petit coiffeur (interprété par Serge Reggiani, toujours impeccable).
La sobriété de la réalisation de Melville fait merveille. En effet, loin de faire de grands effets qui auraient nui au propos en transformant les résistants en de super-héros, loin de faire comme certains films où le héros semble gagner la guerre à lui tout seul, il nous montre vraiment le quotidien d’hommes et de femmes ordinaires, avec leurs qualités et leurs défauts, et qui sont littéralement transcendés par les choix qu’ils doivent faire. C’est en évitant les grands débordements qu’il en fait des héros, de véritables héros.
Questions de morale
Des héros d’autant plus impressionnants que d’innombrables questions se posent à eux sans cesse, à commencer par le problème de la morale. Y-a-t-il des situations où le meurtre est justifié ? Les circonstances actuelles justifient-elles qu’on se place au-dessus de lois humaines que l’on croit injustes, au nom d’une loi supérieure ?
Le film est constamment hanté par le rapport à la mort. La mort des autres (qu’ils soient des ennemis ou des alliés), mais aussi et surtout sa propre mort. La scène dramatique dans laquelle Gerbier (Lino Ventura) est conduit par un peloton d’exécution vers une mort certaine est un grand exemple de cette réflexion, montrant une perception particulière que l’on a de sa propre mort au moment où elle approche.
Une leçon de cinéma
Une autre raison qui justifie de revoir ce film, c’est qu’il s’agit d’un grand moment de cinéma. Derrière une apparente simplicité, se cache une grande maîtrise du langage cinématographique, de la caméra, du jeu d’acteurs, de la bande son, etc…
Un cadrage au cordeau, un jeu d’ombres et de lumière, cette photographie grisâtre qui est une des marques de fabrique du réalisateur, Melville nous donne une véritable leçon de cinéma dans ce film. L’insistance sur les silences permet au cinéaste d’imposer une ambiance lourde, pesante, qui rend les moindres bruits encore plus frappants, les moindres musiques encore plus marquantes.
Faut-il à nouveau préciser à quel point l’interprétation du film est exemplaire ? Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Meurisse sont exceptionnels, là aussi dans une sobriété digne qui en fait des personnages de tragédie.
Car ne nous y trompons pas, L’Armée des Ombres est une tragédie. Au-delà de la lenteur du récit, on sent qu’il coule inexorablement vers une fin marquée par la fatalité (ce qui est, là aussi, une des grandes thématiques de l’œuvre de Melville).
Vous pouvez consulter le dossier pédagogique réalisé par le CNC sur les liens :
http://www.cnc.fr/web/fr/dossiers-p...